Par Marie-Claude Di Lillo, publié dans LE CARNET DE MC, 29 décembre 2020
Récemment j’ai fait la rencontre du Dr Nicolas Cadet, premier ophtalmologiste afro-descendant spécialisé en oculoplastie (chirurgie des paupières et du haut du visage). En plus de son travail qui est unique et qui le passionne, ce qui m’a fasciné chez lui, c’est sa volonté réelle de transformer la chirurgie esthétique pour la rendre plus inclusive. Une vision humaine dans un domaine où le superficiel et l’argent ont trop souvent prépondérance…
Lundi dernier, j’avais rendez-vous avec le Dr Nicolas Cadet sur la plate-forme Zoom pour une entrevue virtuelle. Je voulais en savoir plus sur ce médecin, dans la jeune trentaine, qui s’était déjà mérité une vingtaine de prix académiques et s’était vu félicité à maintes reprises pour son implication sociale. Entre autres faits notoires, il est l’instigateur d’une clinique de dépistage gratuite du glaucome à Montréal-Nord et a participé à de nombreuses missions de chirurgie ophtalmologiques sur 3 continents, afin d’offrir gracieusement des soins surspécialisés à des personnes qui n’y avaient pas accès.
Pour le reste, Dr Cadet travaille comme chirurgien spécialiste en oculoplastie à l’hôpital de Verdun, où il exerce des chirurgies fonctionnelles sur des patients atteints de pathologies oculaires, et il pratique aussi au privé, au Médispa Victoria Park de Ville Mont-Royal et de Longueuil, la chirurgie esthétique avec une spécialité en soins et rectifications du haut du visage.
Comme si ce n’était pas assez, il trouve aussi le temps de multiplier les conférences scientifiques et d’instruire les gens de sa vision holistique et inclusive de la chirurgie esthétique. Vous avez dit, occupé ?
UNE APPROCHE HUMAINE BASÉE SUR LA DIVERSITÉ
Malgré son horaire chargé et la qualité de ses distinctions, le Dr Cadet, dès le début de notre entretient, répond à mes questions de façon posée avec beaucoup de gentillesse et d’humilité. Une attitude un peu désarmante, si je compare avec celle plus froide et superficielle de certains spécialistes en chirurgie esthétique du domaine privé. Encouragée par cette propension à l’authenticité, je l’interroge sur son parcours…
Après avoir complété des études en ophtalmologie à l’Université de Montréal, Nicolas Cadet se surspécialise en oculoplastie, une branche qui s’intéresse à la chirurgie réparatrice et plastique de l’œil et de ses annexes. On peut compter sur les doigts d’une main les ophtalmologistes qui se sont spécialisés dans cette discipline pointue en Amérique du Nord. Le Dr Cadet est un des rares et le premier afro-descendant (de mère caucasienne et de père d’origine haïtienne) au Québec à avoir choisi cette spécialité. Quand on lui demande si cela lui procure une certaine fierté, il acquiesce mais ajoute que cela lui donne surtout une sensibilité particulière à tout ce qui touche à la diversité au sens large du terme. Une priorité qu’il s’est donnée dans son éthique de travail. Je lui demande d’élaborer sur le sujet.
« À l’Hôpital, comme à la clinique Victoria Park Ville Mont-Royal, je rencontre des patients d’origines et de cultures différentes. Il faut savoir que les codes esthétiques du visage peuvent varier selon la culture. Ce qui est acceptable et considéré la norme pour une personne, ne l’est peut-être pas pour une autre venant d’une culture ou d’un milieu différent. J’essaie de tenir compte de cela avant de me lancer dans une chirurgie faciale du haut du visage ou de débuter des soins esthétiques à un patient. » m’explique Dr Cadet.
Il ajoute que cette approche qui tient compte de la diversité doit être « inclusive » selon ses propres mots, et de façon plus large, toucher aussi les patients d’expériences et de milieux différents. « Il faut remettre le patient au centre de notre pratique. On ne peut pas imposer un modèle de beauté standardisé et monolithique, qui convient seulement aux caucasiens, européens ou autres. Cela vaut autant pour les Noirs, par exemple, que pour la communauté LGBTQ. Nos clients sont tous uniques, issus d’un milieu culturel, socio-économique, éducationnel ou ethnique différents. On doit laisser nos préjugés de côté et se mettre à la place de notre client pour le comprendre. C’est ça l’approche inclusive », résume Dr. Cadet.
UNE APPROCHE HOLISTIQUE
Cette vision, certes plus humaniste des choses, m’amène à lui demander ce qui l’a poussé à choisir la médecine et à se passionner pour le domaine de la chirurgie esthétique du visage.
« Cela peut avoir l’air cliché mais c’est assurément parce que je voulais servir ma communauté. Aider les gens, les faire se sentir mieux; c’est ce qui m’importe et je tiens cela de mes parents. Ma mère était médecin de famille. Enfant, je la suivais souvent lors de ses rendez-vous. Et cela me parlait beaucoup. Elle aidait les gens à aller mieux physiquement. Mon père, lui, était pasteur. Il apportait beaucoup de support aux gens de sa communauté, avec sa vision spirituelle des choses. Je crois que cette vision holistique que j’ai, et qui s’applique autant dans ma pratique de l’oculoplastie à l’Hôpital de Verdun qu’à la clinique Médispa avec mes patients en soins esthétiques, vient de cet héritage parental à la fois humain et spirituel », explique le Dr Cadet.
UNE PETITE RÉVOLUTION ESTHÉTIQUE
Dr Cadet admet que son approche personnalisée de la chirurgie et des soins esthétiques fait figure d’avant-garde dans cette profession traditionnellement exercée par les médecins d’un « old boys club », comme il l‘appelle. « Aujourd’hui, on ne peut plus se contenter de pratiquer des injections de Botox ou d’ajouter des agents de comblement, ou encore de faire des chirurgies esthétiques, il faut penser en dehors de la boîte. S’arrêter à comprendre la personne dans toute sa complexité. Prendre le temps avec son patient, l’écouter, découvrir qui il est et quelles sont ses attentes; cela demande d’aller beaucoup plus loin que juste exécuter des traitements identiques à tous. »
Pour le docteur, cette approche de la chirurgie esthétique, est la seule voie possible. Il faut dire que lorsqu’on pense aux mouvements de revendication sociale, telles que le Black Lives Matter ou celles des personnes s’affirmant non genrées, on ne peut que constater que sa prise de position colle à l’air du temps.
« Ce qui m’intéresse dans ce domaine c’est de rendre mon client ou patient heureux. Faire rayonner sa beauté intérieure, lui faire retrouver le sourire, faire en sorte que quand il se voit dans le miroir, il se reconnaît enfin puisque c’est une version de lui ou d’elle, qui est en symbiose avec ce qu’il cherchait à retrouver. Je ne suis pas un psy, mais j’ose croire que je peux faire une différence pour aider mon client à retrouve une confiance en lui. Et ça, ça vaut tout l’argent du monde. »